Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Côté Beurre
Côté Beurre
Derniers commentaires
Archives
25 février 2007

Le cercle des poètes disparates

A mesure que je vous exposai hier une invraisemblable quantité de jeux littéraires, je constatais qu'il manquait quelque chose pour véritablement inspirer les vocations. Une suite de règles risque de n'inspirer personne, hélas, tant l'être humain moyen, n'aspirant jamais à s'élever de la médiocre fange de sa pathétique existence, n'est pas joueur. Combien de fois ne m'a-t-on pas sorti "c'est pour les gamins" ou "non, ça ne m'intéresse pas" ! Ah, comme je méprise ces rétrogrades, et à la fois les prends en pitié.

Grands dieux, est-ce qu'un gamin normalement constitué serait capable d'écrire sans fautes, de nos jours, un texte avec une trentaine d'anagrammes du même mot, en vers, en compétition avec ses amis, et ce sans qu'on le lui dise ? Est-ce que Raymond Queneau, Victor Hugo, Jacques Prévert, Tristan Tzara, Alfred de Musset, Francis Blanche, Georges Perec, Pierre Dac, Italo Calvino et tant d'autres étaient des gamins ? Il faut croire que oui, selon les Philistins obtus gavés de télé qui composent les 99% de la population française.

Et comment savoir, ô, glands infâmes qui, tout autour de la tapisserie aux fils d'or des accomplissements de l'humanité, lui tournez le dos tout en y étant rattachés sans même le savoir, comment savoir, justement, si ce genre de choses "pour les gamins" vous intéresse ou non tant que vous n'avez pas vu de quoi il retourne ? On ne vous demande même pas d'essayer, vous dont le cerveau à vapeur ne peut plus faire le moindre écart sous peine de dérailler... Juste de regarder les exemples suivants.

Voici des cadavres exquis sous forme de questions et réponses. La réponse, si étrange que cela puisse paraître, a été écrite sans que l'auteur en connaisse la question, écrite à part par un tiers qui ne connaissait pas à l'avance la réponse...

Qu'est-ce que tu préfères ? -- Le bon, la brute et le truand. Je préfère le truand.
Qui donne la plus douce des morts ? -- Je préfère ne pas répondre.
Qu'est-ce qui fait des miettes ? -- C'est assez idiot, mais ça ne s'explique pas.
Qui a inventé le mot "prout" ? -- C'est presque impossible de le savoir.
A quoi ressemble un extraterrestre ? -- Cela n'a rien à voir avec la réalité.
Quel est l'auteur de "A la Recherche du Temps Perdu" ? -- C'est une tasse de thé.
Qu'est-ce qu'une question kantienne ? -- Un mouchoir jetable en papier. Au moins.
Quel serait le cadeau de Noël idéal pour vous ? -- Un bol de chocolat chaud.
Qu'est-ce qui fait que les gâteaux suédois sont si savoureux, croustillants et granuleux ? -- Un yaourt périmé avec du beurre, du sucre, du miel et des poivrons.
Papa, c'est quoi cette bouteille de lait ? -- C'est du velcro.
Après PPDA, qui sera le prochain présentateur du JT ? -- Une langue de vipère, en plus coriace.

Il est à noter, au sujet de la dernière question, que ce cadavre exquis fut écris bien des années avant la première apparition télévisée de Harry Roselmack ! Voici un autre cadavre exquis : Trois personnes ont collaboré à l'écriture de cette courte fable, sans savoir ce que les autres avaient fait, hormis le dernier mot de leur phrase. les trois personnes sont symbolisées par trois casses différentes :

Il était une fois un gosse qui avait une bosse. Sa bosse, il ne la montrait à personne. Puis, la grenouille stellaire le sentit. De suite, elle se rua à son secours, car elle savait que la situation était désespérée... Il alla donc dans la plaine des Morghoms, et longuement il chemina dans cette lande désolée, et nombreux furent les Sloars qu'il rencontra... Alors que, pendant ce temps, elle, devant un grand miroir, dessinait dans la buée de cosmiques hippocampes. Face à ces monstres effrayants, elle sortit ses pistolets laser et tira dans le tas. Des cris se firent entendre jusqu'à ce qu'ils explosent dans une énorme gerbe de flammes ! Heureusement, nos héros survécurent, et se remirent de leurs émotions juste à temps pour répondre aux questions des officiers de police. Celle-ci s'interrogeait sur les circonstances étranges qui aboutissait à la formation de bosses. Des bosses, oui ! Voilà ce qui résulta des coups qu'elle leur avait asséné. Mais heureusement, la police était intervenue avant qu'elle ne les enculât avec une algue dure, et, les menottes aux poignets, ils furent emmenés... Sur ces entrefaites, à Tokyo, il était dix heures passées. Ils furent donc emmenés en prison dans le district de la plaine des Morghoms, vu que les Sloars n'étaient pas contents. Pas du tout ! C'étaient d'étranges cercles rouges qui déchiraient l'azur et finissaient enfin. Mais après toutes ces aventures, elle se dit qu'elle avait bien besoin d'un petit remontant. Elle se dirigea alors vers le bar le plus proche. Elle appela le barman et commanda une armée au XVe siècle: Oui, tel était bien l'ancêtre du fier Sloar Morghom qui prit la déposition de nos héros. Il s'impatienta alors que son interlocutrice mettait trois heures pour aller aux WC, car c'est fini les beaux jours, la panse crevée, ouverte aux quatre vents, exhala les puanteurs fétides de l'antre de l'enfer...

Rocambolesque, non ? C'est dix fois plus drôle à écrire qu'à lire.

Voici à présent des bouts rimés, ces quatrains aux rimes imposées dont j'ai souvent parlé :

Choucas / Fracas, Roncevaux / Rototo

Obstrué du caca d'indélicats choucas,
Le cor à Roncevaux
D'un Roland furieux, loin de causer fracas,
Ne fit qu'un rototo.

Dors, mon petit moineau, dors, mon tendre choucas,
N'écoute pas dehors les belliqueux fracas.
Ton papa est parti se battre à Roncevaux,
Toi, tu es à l'abri, et fais ton rototo.

Muse / Arquebuse, Chipoter / Clapoter

Raconte-moi les exploits de Cortès, ô Muse,
Ce con qui statua là-bas sans chipoter
Sur les terres lointaines gagnées à l'arquebuse
Et qui fit violemment notre sang clapoter...

J'abattrais volontiers d'un bon coup d'arquebuse
Les pédants qui ne font toujours que chipoter
Croyant avoir grandi buvant el lait des muses :
Comme lait, ils auront leur sang pour clapoter !

Prosper / Polyester, Chien / Acarien

Las d'éternuer, Prosper,
Allergique à tout, épila son chien,
Mit chez-lui partout du polyester
Pour chasser les acariens.

Dans sa boite en polyester
Attendait le jouet Prosper.
De jouet il servit, mais au chien,
Et finit parmi les acariens.

Sauterelle / Bretelle, Orteil / Vermeil (Notez l'énorme différence des deux poèmes)

Moïse du grand roi remonta les bretelles,
Et, de ce pharaon, cassant bien les orteils,
Fit prendre au Nil une couleur de sang vermeil
Avant d'appeler à la plaie des sauterelles.

Cette grande sauterelle
Tout au bord de la bretelle
Avec sa robe vermeil
Tapine, vernie aux orteils...

Halogène / Romaine, Soeur / Tumeur (Avec dans chaque poème une entorse en forme de calembour)

A la lueur d'un halogène
Voilà le beauf avec sa soeur
Qui mange une salade romaine :
Plus bidochon que ça tu meurs...

La mère supérieure disait à sa soeur
Que ce qui l'embêtait dans l'Eglise Romaine
Ce n'était pas tant du Saint Pape les tumeurs
Mais l'ostentation : Des saints, le halo gêne.

Pensées / Tourmentées, Putride / Aristide

La noblesse d'Hamlet, pourtant fier aristide,
Passe son temps trop long en de noires pensées :
Le royaume de Danemark est bien putride,
Et les esprits défunts d'Elseneur tourmentés...

N'aie pas cette pensée,
Tu es mou, Aristide !
Ton odeur est putride,
Ton vit m'a tourmentée !

Hasard / Canard, Iris / Pastis

-- Bonjour mademoiselle, quel heureux hasard
De vous trouver ici pour prendre le pastis !
-- Monsieur, j'étais allée en forêt aux iris...
-- Puisque vous êtes-là, voulez-vous du canard ?

Une pute marseillaise du nom d'iris
Négociait la nuit d'un quidam au hasard
Et disait "Pour cent balles je paie le pastis,
Et c'est ou tu voudras que tu fais ton canard..."

Spandex / Sexe, Biblique / Théorique

Portant sous sa soutane un body en spandex
Et en son coeur si grand une mission biblique,
Super-prêtre, ennemi des vices théoriques,
Vient sauver nos enfants... Et leur montre son sexe !

Faut-il vraiment mouler son paquet en spandex
Pour, au sein du marais, suggérer mieux le sexe ?
Pour connaître les hommes de façon biblique
Il ets des moyens moins visibles, théoriques.

Autres bouts rimés écrits alors que chaque joueur tirait des rimes différentes... Aucune obligation de tout lire, mais ils sont tous bons !

On célébra de la rombière le très étonnant mariage
Avec son homme de ménage à long nez et grandes oreilles,
Obéissant et sans manières, expert dans l'art du balayage,
Passant le chiffon sans tapage, astiquant les cuivres vermeils...
(Notez les rimes internes !)

Définition relative d'une plage :
Endroit toujours bondé où l'été on dégage,
Dont le pétrole occupe les deux tiers de l'aire,
Et, malgré cela, vu comme un lieu vulnéraire.

J'avais inventé le téléphone potable
Avec un goût carotte qui rendait aimable,
Ou, pour l'antisémite, au choix, le goût melon...
Le bureau des brevets m'a passé un savon.

Avec les mecs j'ai pris deux ou trois petits fours.
Je fossilise seul au fond de ma résine...
J'aimerais tant revoir encor cette morphine,
Cette drogue sucrée que l'on nomme l'amour...

Géraldine avait de beaux restes
Qu'elle montrait sous ses couvertures...
Elle voulait tant qu'on la triture,
Elle qu'on disait jadis céleste !

-- C'est la révolution, nous sommes tous égaux,
Mon voisin m'a dit ça en sortant sa poubelle
Quand je déblayais l'allée à grands coups de pelle !
-- Mais non, c'est demain, ils l'ont dit à la radio...

Fantasmant de reprendre d'un führer la piste
Et d'être dictateur (rêve surréaliste ?),
Le jeune Nicolas et la veuve poignée
S'amusaient dans sa chambre à la lueur tamisée...

Tu as usé à ton gré de mon atrium,
Et voilà que, chassées par l'interne mistral,
De blanches larmes perlent à mon creux anal
Entourées de grelots bruns et noirs criterium.

Pour que de la nature on vive les merveilles
Et que de gros poupons sortent comme des pains
De cet humide four que l'on nomme vagin,
Il faut bien qu'il en coule un peu de sang vermeil...

Voyez-vous, mes amis, quand on a des pépettes,
On met derrière soi les coutumes barbares...
Plutôt que de collectionner les magnets,
On empile les sacs à main et les foulards !

Et enfin, mon préféré...

J'aime un' fille', c'est un truc, t'ain, chais pas, viscéral,
Quoi, tu'ois, alors j'vais la voir et j' dis "Oh, ! Paulette !
Oua j'te kiffe !" Mais e's'met à m'dir qu'chuis un' lopette,
Alors moi forcément, t'sais, j'la frappe, a pis elle' râle...

Bon appétit, et à demain si vous le voulez bien !

Po_te

Publicité
Commentaires
Publicité
Newsletter
Côté Beurre
Publicité