Oncque, au logis

A tous mes fans (je veux parler de ceux qui ne sautent pas au billet suivant quand ils voient que je n'ai rien d'autre à dire que de raconter ma vie... Merci pour eux, c'est déjà pas mal !), voici la suite de mes aventures capillicoles. Dans l'épisode précédent, je m'étais fait couper court, limite brosse. Pas "action française" non plus, hein. Genre brosse douce et uniforme. Très sympa.
Le coiffeur, obligatoirement avec un nom italien, avait des directives simples. Sur le moment, c'était bien. Le lendemain, c'était incoiffable : j'avais dormi sur un épi, les cheveux étaient trop courts pour être rabattus et trop longs pour que ça ne fasse pas ridicule. Genre, les cornes de daniel Auteuil dans "Ma vie est un enfer". Une semaine plus tard, c'était pire : informe et moche.
Imaginez des cheveux de bonnet à perpétuité. Après quelques temps (c'est à dire tout juste cette semaine), ils étaient revenus à une longueur décente et suffisante pour les coiffer. Et camoufler un peu les trous des mèches disparates. Brosse douce mon cul, oui. A la fin de cette semaine, j'en avais marre de les recoiffer sans cesse. J'ai donc demandé à un ami de me couper les cheveux.
Oui, j'étais las de ces mercantiles faux experts, et en plus je voulais simplement... Plus de cheveux. C'est vrai, comme ma chevelure se clairsème quelque peu, je me suis dit "vas-y, c'est la mode, les footeux le font, les stars aussi, Kojak et Yul Brynner sont virils... assume ton crane". Et en plus les skinheads, c'est un fantasme chez certaines personnes. Oui, bon, chez certains personnes, hein...
Et donc je me fais tondre. Je vous passe les détails, les poils partout sur le sol, les poils partout mais attachés à moi cette fois (Oui, comme chez beaucoup d'hommes, mes cheveux ne font que migrer vers le bas du corps...), et quand je vais vers le miroir... Eh bien c'est réussi. C'est uniforme, net, sympathique, pas dur à entretenir, et même un peu sexy. Quoi, vous préférez la fausse modestie ?
Seulement le problème c'est que j'ai la crève. Pas grand chose un peu de toux... Mais avec les cheveux dans le nez, et surtout le chat de mon ami (auquel je suis cordialement allergique, comme à tous les chats ayant des poils...), tout ça a empiré. En sortant de l'enfer pileux, j'avais les yeux rouge, le teint cireux, le souffle court et haletant, l'air patraque, des quintes de toux... et même des cernes.
J'avais un grand manteau sombre et une casquette un peu trop grande (qui n'en revenait pas de n'avoir plus cette épaisseur de cheveux à laquelle se fixer !), le tout rehaussant la paleur de mon teint. Ma toux grasse aidant, j'aurais pu passer pour le gentil Timmy, du pavillon des cancéreux/leucémiques, invité au Téléthon cette année parce que c'est sa dernière chance. Je vous dit pas les regards.
Alors bon, j'ai essayé de sourire. Et j'avais envie de leur dire "mais non, quoi, merde, je suis pas cancéreux, j'ai pas une leucémie, ni le SIDA, ni la lèpre, ni la peste bubonique ! C'est juste une bronchite qui passe en trois coups d'aspirine... Je vais vivre, bande de connards ! Je ne fume même pas !"... Et là j'ai compris à quel point c'est chiant, le regard des autres, quand on a ce genre de choses.
Faites-moi plaisir : dans le métro, vous voyez quelqu'un comme ça, vous mouftez pas. Le regard à quinze pas, point. N'ayez pas l'air mal à l'aise, ne faites rien. Prenez votre air le plus indifférent, ou, si vous devez absolument vous donner une contenance, vous regardez votre montre, vous tripotez votre mobile, vous vous concentrez sur un truc, le plafond... Tout ce que vous voulez mais pas lui.
Il ne vous dira pas merci, mais pendant un trajet, il se sentira comme les autres : inintéressant, mais dans le bon sens !