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Côté Beurre
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5 janvier 2009

Fromage à trois...

En l’honneur de la nouvelle année, nous allons parler sexe… Attention, hein, on ne va pas raconter des histoires érotiques ! Non, nous allons être un peu didactique. Et, encore une fois, ça ne signifie pas non plus qu’on va jouer les Doc et Difool (oui, je sais, seuls les plus vieux que moi s’en souviennent encore, de ces deux couillons…). Les forums pour ados boutonneux, c’est pas ici.

Les questions style « J’ai envoyé un SMS à un garçon et j’ai 10 minutes de retard sur mes règles, suis-je enceinte ? » et « J’ai 12 ans et j’ai tenu la main de mon meilleur ami, suis-je homo ? » on va sagement éviter. Non mais c’est vrai, quoi, je comprends les inquiétudes des prépubères crédules en pleine société du porno, mais on voit ça à longueur de temps sur Internet, au bout d’un moment ça saoule…

Mais glissons. Aujourd’hui, on va parler bisexualité.

J’ai souvent été confronté à cette notion, ce blocage culturel… Pour quelqu’un qui se dit hétérosexuel, une attirance même passagère pour les mecs signifie obligatoirement qu’on est pédé. Enfin, homosexuel, mais c’est plus long à écrire, et ça décrit beaucoup moins bien l’idée que je souhaite faire passer : pas seulement une certaine sexualité, mais aussi une forme d’insulte, de diminution de la virilité par rapport au mâle hétéro.

Le fait est que, même si un mec est toujours attiré par les filles, s’il ne cache pas qu’il est attiré par les mecs aussi, il sera considéré comme gay par la plupart des hétéros. Le plus drôle, c’est que, pour un homosexuel pratiquant et sorti du placard, la moindre attirance passagère ou prolongée pour les filles AUSSI est une indication certaine d’hétérosexualité…

Un gay qui ressent parfois une attirance pour les filles peut avoir intérêt à le cacher dans le milieu de ses amis homos, et gare à lui s’il se met à la colle avec une fille. Cela peut être ressenti comme une trahison, dans une communauté telle que le milieu gay. J’en connais qui disent alors que « ça n’était pas un vrai gay »… Le mec en question est aussitôt catalogué hétéro. Et s’il se remet avec un mec, on « excusera » sa passade hétérosexuelle !

Mais il ne viendrait à l’idée de personne d’envisager cela sous l’angle de la bisexualité.

J’exagère… Il y a tout de même des gens tolérants. Mais tout de même, je constate que de très nombreux gays se disent homos alors même qu’ils ont déjà éprouvé des sentiments, voir une attirance physique, pour des filles… Et de nombreux hétérosexuels se disent « pas des pédés » alors que, secrètement, ils ont été attirés par des mecs (dans la rubrique « c’est de l’amitié virile », et tout ça…)

La bisexualité est un genre de tabou, un truc qui existe peu… un état qui, dans l’esprit de ceux qui se sentent d’un côté ou de l’autre de la barrière homo-hétéro, n’est qu’un intermédiaire. Certains disent que c’est l’état de quelqu’un qui doute de lui, ne sait pas où se placer… Et j’en ai entendu de nombreux, gays et hétéros, qui disaient à qui voulait l’entendre que la bisexualité n’existe pas !

On pourrait croire que, dans le milieu gay, il n’y aurait pas ce genre de problème de tolérance… C’est mal connaître le milieu gay, qui peut être l’un des plus intolérants au monde en ce qui concerne les hétéros. De fait, du point de vue historique, le mouvement gay a été fondé par des homosexuels qui ne pouvaient pas vivre leur sexualité autrement qu’avec des gens de même sexe.

Ce sont eux qui ont milité pour une reconnaissance, et qui ont permis à ceux qui n’avaient qu’une sexualité gay occasionnelle de se reconnaître dans ce mouvement, voire de « s’orienter homo » pour des questions de liberté. Donc, culturellement, il y a aujourd’hui homo ou hétéro, mais pas les deux : la bisexualité n’est pas reconnue, ce qui mène à des situations pour le moins étranges.

Par exemple, l’homme marié qui trompe sa femme avec des hommes.

Il est, logiquement, au moins un peu bisexuel… Pourtant, sa femme pense qu’il est hétéro, mais malade ou en plein désarroi. Et les homos pensent qu’il n’est qu’un pédé refoulé. Il ne leur viendrait pas à l’esprit que c’est quelqu’un qui est attiré par les deux sexes et que ce qui le piège, ce qui fait qu’il ne sait pas où il en est sexuellement, c’est justement ce genre de préjugés artificiels !

Ce n’est bien entendu pas si simple, mais comment expliquer autrement que par la bisexualité le fait qu’un mec bande pour des individus des deux sexes, et puisse à la fois sucer un mec et faire des gosses à une femme ? Pourtant, la bisexualité n’est considérée que comme l’apanage des ados qui expérimentent ou des obsédés refoulés, ou des pornographes pervers et partouzeurs blasés par les plaisirs moins épicés…

Bref d’une sexualité mal définie, extrême, perturbée, marginale même chez les gays. Le bisexuel, c’est, dans l’imaginaire collectif, non pas quelqu’un qui assume une préférence sexuelle, mais quelqu’un qui ne choisit pas, n’a pas choisi, refuse le choix, ou essaie l’autre bord par perversion pure, comme on serait sado-maso, comme on s’infligerait une douleur dans un cadre sexuel… Etrange, non ?

Comme si tout devait être binaire et rentrer dans des cases par deux : homme ou femme, homo ou hétéro, actif ou passif...

Les hétérosexuels et les gays ont tous des archétypes, plus ou moins souhaitables et plus ou moins flatteurs, mais en tout cas bel et bien définis et assumés dans notre société… Une place que les gays ont d’ailleurs conquise de haute lutte, et qui ne leur est toujours pas acquise, mais il s’agit au moins d’une reconnaissance. Que reste-t-il aux bisexuels, en tant que modèle culturel ?

L’homme marié perturbé et l’ado sexuellement ambigu, on a vu… Il reste l’acteur porno. Ou alors le métrosexuel androgyne, intellectuel et légèrement drogué. Ou le transsexuel. Pour les femmes, c’est encore moins simple : pour la société hétérosexuelle mâle, la lesbienne n’existe que depuis peu, et c’est un fantasme pour de nombreux beaufs en rut… Une bisexuelle est donc un objet sexuel, seule lesbienne non castratrice.

Autant les homosexuels ont réussi à conquérir (un tout petit peu, c’est pas encore ça…) une image de gay d’aspect normal, pouvant faire d’autres choses que baiser, pas forcément efféminé ou stéréotypé… autant les bisexuels en sont encore au stade ou c’est invisible, improbable, bizarre, et ou ça surprend quand on l’annonce ! Et ça n’est pas près de changer : il n’y a PAS de militantisme bisexuel.

Et pourtant… Qu’en est-il de la réalité, au-delà des catégories et des stéréotypes ?

Les psychiatres se sont maintes fois trompés, mais il y a quelque chose qu’ils disent depuis longtemps et qui se tient : personne n’est vraiment homosexuel ou hétérosexuel à 100%, de même que peu de gens sont vraiment bisexuels avec 50% de chaque orientation. La sexualité n’est d’ailleurs pas qu’une question de genre et/ou de sexe, et il faut plus que simplement homo ou hétéro pour la définir.

Quelle est la part de l’inné et de l’acquis là-dedans ? Les débats font rage, et c’est un sujet sensible : il y en a toujours pour dire que si c’est inné, c’est une tare que d’avoir une sexualité qu’on juge « contraire » à son but procréatif, qu’on juge donc « normal »… Et il y en a toujours pour dire que si c’est acquis, c’est une maladie mentale. Il ne sert donc à rien de trancher, si seulement c’est possible, dans ce type de débat empoisonné.

Par ailleurs, je sais qu’il existe des bisexuels assumés, normaux, qui n’ont pas honte de leur double attirance. J’en connais, et même très bien. Si je me définis personnellement comme gay, et que je suis tombé amoureux d’un homme, il n’est pas exclu que je sois attiré par des filles… La morale de l’histoire, s’il en est une, est qu’il faut se décomplexer un peu et s’affranchir de certains carcans, qu’on soit gay ou hétéro.

C’est si rare de tomber amoureux de quelqu’un, si en plus on doit s’arrêter à un détail comme le sexe… Se faire du bien, c’est toujours se faire du bien, en dépit de toute convention.

Threesome_1994

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Commentaires
E
Ben oui, évidemment, par le passé et aussi dans d'autres cultures que la nôtre, les questions de genre et de sexe ont été traitées différemment... <br /> <br /> Plus ou moins bien, d'ailleurs : les latins et les grecs faisaient plus de façons qu'on ne le pense face à l'homosexualité, ils l'acceptaient juste différemment... Et, si ce sont eux qui ont eu une grande influence sur notre société actuelle plutôt que les vikings ou les maliens, ce ne sont pas forcément ceux qui ont la réponse idéale... si tant est que ce genre de choses existe !<br /> <br /> Le principe même d'une culture, de toute culture, est basé sur l'appartenance à un groupe, et si cette pratique a ses avantages, elle a ses excès évidents. Le moins que l'on puisse dire c'est que c'est moins fatigant que de réfléchir, et aussi beaucoup moins souple. Mais réfléchir et se questionner sur les valeurs qu'on nous enseigne, comme sur le reste, n'est certes pas à la portée de tout le monde...<br /> <br /> On en revient à l'éducation, seul processus qui permette de faire ressortir ceux qui ont le potentiel d'être plus que des cons de base : L'individualité, la réflexion propre n'est pas quelque chose de présent ab initio, mais quelque chose de cultivé par un processus de questionnement d'abord dirigé par autrui.<br /> <br /> Et voilà pourquoi tant de gens suivent les stéréotypes...
M
J'avoue que le sujet est délicat et bien traité. <br /> <br /> Il me semble qu'il suffirait de regarder quelque peu en arrière dans certaines civilisations antiques pour voir que la bisexualité n'a pas toujours été considérée comme aujourd'hui. Regardons chez les romains ou les grecs... <br /> <br /> Au passage, je trouve quelques extraits du Satyricon sur ce thème de la sexualité antique assez hilarants : http://remacle.org/bloodwolf/roman/petrone/partie3.htm#LXXXV<br /> <br /> Au final, je me demande bien pourquoi on cherche à mettre un préfixe devant "sexualité", si ce n'est pour se classer dans un groupe. Ah oui, j'oublie être membre d'un groupe, faire partie d'une catégorie, ca rassure...
E
Merci à Paf Ze Cat d'avoir contribué à ce sujet de façon aussi intime: c'est à la fois pertinent et gentil de sa part.<br /> <br /> C'est d'ailleurs entre autres à lui que je pensais en disant que je connais des bisexuels assumés (peu nombreux quand même !), et je suis heureux qu'il ait souhaité partager son expérience ici. Il fallait des couilles, il les a.<br /> <br /> Pour en revenir à la "cause" bisexuelle, qui n'existe pas, je pense tout de même qu'il y a un réel malaise du bisexuel, notamment celui qui s'ignore ou se découvre, ou ne veut pas s'assumer autrement qu'en tant que gay ou hétéro, et n'est pas aussi mûr et réfléchi que Paf Ze Cat...<br /> <br /> En plus, tout ça change effectivement: on n'est pas forcément aussi homo ou hétéro, dans les mêmes proportions, selon les périodes de sa vie... Comme on n'est pas forcément une chaudasse qui baise à tout va tout le temps, non plus.<br /> <br /> Bref, c'est pas simple.
P
Je vais pas apporter de contribution super utile au débat, vu que le sujet est déjà bien brossé, le poil lisse et soyeux et la truffe au vent.<br /> <br /> Ce que je peux partager en revanche, c'est mon vécu (certes assez neuf) de bissexuel.<br /> <br /> Il est vrai qu'on rencontre très souvent des gens qui ne comprennent pas. J'ai entendu souvent la question "mais en ce moment t'es plutot quoi ?" ou encore "avec qui c'est le mieux ?".<br /> <br /> Donc j'ai échaffaudé une réponse toute faite qui m'évite d'avoir à reflechir inutilement, et qui rejoint ta conclusion :<br /> <br /> "Quand je rencontre quelqu'un avec qui j'ai des affinités et qui me plais, je me pose pas la question de savoir si c'est un homme ou une femme, c'est tout."<br /> <br /> Mais malheureusement beaucoup de gens n'ont pas la maturité nécéssaire pour comprendre.<br /> <br /> Quant à la "cause bi" inexistante... en tant que j'm'en-foutiste professionnel je suis peut être mal placé pour parler, mais je crois pas qu'il y ai de vrai malaise. Moi, si je suis bi, c'est que j'ai le bon sens de pas me limiter pour des raisons autres que "j'aime / j'aime pas", et après, ce que pensent les autres...<br /> <br /> La seule opinion qui m'interesse est celle de ma petite copine actuelle, et ceux et celles qui l'ont précédé et qui lui succederont peut etre.<br /> <br /> Mais ca c'est une toute autre paire de manches.
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