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Côté Beurre
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25 juillet 2008

Les côlons de Catane

Bon, ça y est, fini les vacances. Le saviez-vous ? J’ai découvert lors de mon séjour en Sicile (car, oui, j’étais en Sicile) que la ville de Catane existe bel et bien, sur une île qui plus est (la Sicile, abruti(e) !), ce qui rend le jeu « les colons de Catane » d’autant plus… Bref, oui, je suis un gros geek, on ne se refait pas. Comme j’en vois dans le fond qui me demandent comment est la Sicile, je vais répondre…

Misérable.

Alors oui, ça fait tout de suite « le gros con chauvin qui va dans un pays et qui dit que tout est moins bien qu’en France »… Eh bien j’assume ! Mais pas le côté gros con. Parce que je ne me sens pas obligé, en toute objectivité (pour une fois), de faire l’hypocrite à propos de ce que la Sicile a de minable, de ce qui entache ses beautés… De la même manière, je ne me gène pas lorsqu’il s’agit de la France.

Cassons immédiatement le mythe de l’Italian-lover : les beaux italiens sont aussi rares que les beaux français, et cela ne tient souvent qu’à leur jeunesse. Oh, certes, le minet des plages, le beau maître nageur, le moniteur de machin-truc, tous ces modèles sont disponibles en Italie, et donc en Sicile, mais ne sont-ils pas clonés en quantité industrielle dans la plupart des pays, dans les teintes locales ?

Volontiers négligé, velu, malpoli, caractériel, en surpoids et n’assumant pas sa calvitie, le Sicilien moyen, quant à lui, parle fort et avec une fierté souvent mal placée. Parfois sinistre, il peut se révéler serviable et commerçant (dans le bon comme dans le mauvais sens du terme). Un parisien ne sera donc absolument pas dépaysé par la population sicilienne…

Les chiens errants se déposent en flaques pleines de puces au soleil, et les vieux alcooliques traînent devant les clubs d’anciens combattants ou autres vieux parrains, tandis que la population active s’occupe à défigurer les somptueuses montagnes escarpées à coups de raffineries disgracieuses et de véritables murs de HLM en béton aux couleurs hideuses.

L’écobuage sauvage et irresponsable parachève le bucolique tableau de la campagne sicilienne avec des champs noircis, des colonnes de fumée menaçantes, des flammes qui lèchent parfois les routes et s’étendent de manière mal contrôlée, une odeur acre, et les sirènes puissantes des camions de pompiers (qu’ils appellent par ici vigiles du feu).

Je ne parlerai pas des horaires des magasins siciliens, étranges pour un Français : n’importe quel voyageur expérimenté vous dira que dans chaque pays, voire dans chaque région, les horaires sont différents, et que seuls les touristes minables les trouvent erratiques ou mal fichus. Il faut s’y faire, voilà tout, puisque c’est ainsi que les gens vivent ici ! On n’est pas des bœufs, tout de même.

Palerme, particulièrement, est en ce point la perle de l’île. L’odeur des rues y est pareille à leur état de délabrement : avancée. Il s’agit véritablement d’un paysage pratchettien : que ceux qui rêvent de voir Morpork la Putride (à défaut d’Ankh la Fière) soient désormais avertis que cette ville existe, et qu’elle a pour nom Palerme. Ce n’est pas un cliché, j’y étais.

On trouve partout dans ces ruelles pittoresques (lire « crasseuses ») et typiques (lire « dangereuses ») les traces d’ordures et de détournements de fonds publics par l’une des diverses incarnations de la Mafia : de grands panneaux publicitaires montrent l’un ou l’autre politicien propret remerciant chaleureusement ses électeurs de l’avoir réélu… au milieu d’un monceau d’ordures dans une cité minable !

L’état indiciblement ruineux des monuments et des immeubles, même dans le centre-ville historique, est un autre signe de pauvreté (ou plutôt de magouilles, l’Italie étant tout de même un pays civilisé et moderne par ailleurs…). Certaines façades s’ornent de fissures larges comme un homme, laissant apparaître des briques à demi effondrées sur lesquelles poussent des herbes folles en masse…

Ces façades sont celles d’immeubles visiblement habités ! Elles sont parfois retenues par des filets grossiers pour éviter qu’elles ne s’écroulent sur les passants, dans la rue. Les herbes folles, d’ailleurs, parties de ces murs et toits  recouverts, ont fini d’envahir les trottoirs crevassés et s’y sentent chez-elles, colonisant peu à peu la rue lorsqu’elles ne sont pas gênées par les voitures.

Enfin, ça, c’est lorsqu’il existe des trottoirs.

En plein centre-ville, piétons et voitures cohabitent de peine et de misère sans le moindre guide, sans un seul passage clouté, avec le rare feu rouge (qui ne fonctionne pas, et auquel personne ne fait attention de toutes façons) pour tenter d’éviter la mort qui roule… Les siciliens se débrouillent en faisant des grands gestes aux conducteurs, et certains ralentissent même un peu le temps qu’ils passent.

Ce petit manège peut se faire à n’importe quel endroit d’une rue.

Le fait que les automobiles roulent en ville, dans des ruelles miniatures, à des vitesses dignes des autoroutes françaises n’arrange rien. Du reste, sur route ou sur rue, quand ils existent, les panneaux du code de la route ne sont pour eux que des suggestions… Les limitations de vitesse ? Les panneaux sont là, mais il s’agit sans doute d’une décoration, de même que les lignes blanches, lorsqu’elles existent !

Pour ce qui est du code de la route, en Sicile et partout ailleurs en Italie, c’est presque une légende. Pas étonnant que les conducteurs italiens soient réputés : après avoir survécu à ça, on peut conduire n’importe-où sans avoir d’accident. D’ailleurs, pour pouvoir suivre et continuer à procéder à leur propre racket, les carabinieri (maréchaussée italienne) se sont dotés… de voitures de courses !

Quant aux nombreux et magnifiques sites historiques siciliens, dont beaucoup datent de l’ère classique grecque ou de l’empire romain, ces aqueducs, ces digues, ces drains et égoûts bien conçus, ces routes, ces terrains aménagés, ces mosaïques, cette architecture, ils ne prouvent qu’une chose : les anciens siciliens possédaient une ingéniosité, un dynamisme et un savoir dont les siciliens modernes sont totalement dépourvus.

Voilà. Voilà ce que c’est que la Sicile : une partie indigente, misérable, crasseuse et appauvrie d’un pays pourtant industrialisé et nanti d’une histoire et d’une culture unique au monde. Une région qui rivalise en chaleur et aridité avec l’Egypte et l’Andalousie, qui subit de très nombreux problèmes (et, parfois, y fait face) sans vraiment d’excuse.

A part ça ? Bah, c’est sympa. Les paysages et les monuments sont grandioses, et il y fait 40 degrés à l’ombre.

Au fond, que demander de plus ?

Une_offre_qu_on_ne_peut_pas_refuser

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Commentaires
E
Pour ton information, chère lectrice, je VIS à Paris. Si tu lis correctement le billet tu verras que j'y compare Palerme et Paris, explicitement et implicitement.<br /> <br /> Par ailleurs, va donc visiter Palerme, c'est dix fois plus crasseux et mafieux que les quelques merdes de chiens et papiers gras de notre capitale... Et la misère y est omniprésente.<br /> <br /> C'était tout le but de ce billet.<br /> <br /> Mais n'hésites pas à me renvoyer d'autres commentaires comme celui-là : j'aime rire.
A
Je ne sais pas d'où tu viens en France, mais va visiter Paris, et donne ton avis.J'ai horreur des critiques(peut-on appeler ton article critique)c'est carrément un règlement de comptes.Notre capitale ne vaut pas mieux que Palerme.Raquets, vols, agressions, merdes de chiens, délinquance, clochards dans chaque rue, insécurité, pollution.Et on critique la Sicile...Pas besoin de payer aussi cher ton billet d'avion pour trouver une ville à démolir en critiques, prend un aller direct pour Panam.
E
Voilà une vraie connaisseuse.
F
J'en reviens tout juste, et moi non plus je ne veux pas jouer les beaufidés qui critiquent tout ce qui sort de leurs références ! Mais tu as oublié les prix exorbitants des entrées de musée ou des excursions (130 € à 3 pour monter sur l'Etna ... slurp !) les plages immondes où tu ne peux pas mettre un pied tellement il y a d'ordures (t'as envie de faire trempette quand tu vois le bleu de la mer, et puis c'est les vacances quand même !) la très relative amabilité des professionnels du tourisme ... Quel dommage, parce que le tourisme est un bon moyen de se sortir (un peu) de la misère !<br /> Malgré tout ça j'ai bien aimé cette île que j'avais visitée il y a ... 35 ans (re-slurp!) Je trouve qu'il y a une ambiance spéciale, une atmosphère à part...<br /> Peut être est-ce dû à l'indicible bonheur d'être encore en vie en descendant de ta voiture !
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