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Côté Beurre
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24 mai 2008

Concombre masqué...

Il est temps, je pense, d’aborder un sujet plus léger que la politique, l’éducation ou la bêtise humaine… Et quoi de mieux pour se distraire qu’un bon roman ? Tiens, un bon Gaston Leroux, par exemple. Quoi ? Vous préférez les films ? Les livres durent plus longtemps, vous savez, et c’était tout ce qu’ils avaient à l’époque… Mais soit, j’aime les films aussi, et je ne ferai pas la fine bouche.

Je vais donc vous parler du Fantôme de l’Opéra, qui était un livre de Gaston Leroux avant de devenir des tas de films (dont aucun ne rend justice au roman, mais bon, c’est difficile, aussi). La version que j’ai vu récemment est celle de 1943, la première en technicolor (in flaming technicolor, dit l’affiche !) Avec Claude Rains dans le rôle titre, mais aussi Susanna Foster et Nelson Eddy.

Environ vingt ans après le premier Fantôme de l’Opéra, celui de 1925 avec Lon Chaney, Universal s’est dit qu’il fallait faire une version en couleurs, sonore et revampée… D’une part parce que ça pouvait faire des sous, et d’autre part parce qu’un film sur l’opéra qui n’a ni musique, ni couleurs, ça la fout mal. Là, le réalisateur et les producteurs compensent à mort.

Je veux dire, c’est la seule version du Fantôme à ma connaissance qui comporte des scènes entières de « vrais » opéras sur scène ! Ce film a bénéficié d’un budget plutôt pas mal compte tenu de la guerre : Un chœur de plus de cent personnes… Bon, comme ce sont des acteurs, à part le baryton Nelson Eddy, ça n’est pas vraiment de l’opéra, plutôt des airs d’opéra croonés par des chanteurs de variété.

Mais c’est un bel essai, surtout dans un décor de carton-pâte qui reproduit le Palais Garnier (indisponible car occupé par les Allemands à l’époque).

Rendons hommage à ce film qui est le seul à avoir suivi la logique Fantôme de l’Opéra = Vrais opéras, contrairement au récent navet de Andrew Lloyd Weber, qui, s’il est effectivement un film musical, tombe dans le ridicule achevé assez vite à force de mauvais chanteurs de Broadway, d’effets disneyens mal fichus, et de synthétiseur… Et contrairement à tous les autres films, d’ailleurs.

Quoi qu’il en soit, à part ça, cette version de l’histoire est assez éloignée du bouquin… Le Fantôme est ici un violoniste qui entretient son obsession (en fait une relation père/fille torturée) pour notre éternelle héroïne niaise, Christine. C’est aussi une version ou on voit pour la première fois le Fantôme « avant » et « après » le fait qu’il soit horriblement défiguré à l’acide.

En l’occurrence, c’est la secrétaire du graveur que le futur Fantôme est en train d’étrangler (un imbroglio parce qu’il pense qu’on lui a volé son concerto) qui prend un petit bac d’acide (pour les eaux-fortes, vous savez…) et le balance à la figure de l’agresseur… Nous voyons les conséquences de cet acte dans la scène que tout le monde attend, à la fin, celle ou Christine démasque le Fantôme…

Et il est horrible. Il est défiguré. Enfin, il n’est pas si terrifiant (on est en 1943, et on a assez vu d’horreurs comme ça… notamment dans le film qui grouille de français moustachus et vaudevillesques), il a juste l’air brûlé, avec un peu de latex sur l’œil. On a envie de lui filer une crème contre les brûlures. Voire de la biafine. Ou de lui faire essayer Biactol…

Ce fantôme est d’ailleurs plutôt bénin par rapport à d’autres. Là ou certains empalent leurs rivaux sur des têtes de licorne traversant la scène, il se contente d’étrangler deux ou trois imbéciles et de faire tomber le Grand Lustre sur le public (et, bien sûr, on ne voit jamais les corps, époque oblige). Il a aussi un masque pas très effrayant, et… Ben, Claude Rains n’est pas très grand…

Cependant, sans être effrayant, il arrive à être intimidant en projetant son ombre, et, d’une manière générale, en n’étant pas trop visible, caché derrière son manteau, son masque, son ombre, dans les coins, hors de vue, hors champ… C’est une prouesse, il faut le reconnaître, mais probablement pas pour Claude Rains, qui a fait la même chose, sommes toutes, lorsqu’il a joué l’homme invisible en 1933.

La fin de ce Fantôme fait presque pitié : enterré sous les fondations de l’opéra qui s’écroulent sur lui (alors que l’opéra reste debout, étrangement), sous l’éboulement déclenché par un seul tir de pistolet à grenaille (ils avaient des putain d’armes à l’époque, hein !), il n’en reste qu’un violon et un masque artistement déposés comme une gerbe sur sa tombe improvisée.

Pour résumer, ce Fantôme là n’est pas le plus costaud de tous, mais c’est le plus bariolé et le plus divertissant, le plus musical, le plus technicolor, et, l’un dans l’autre, un très joli voyage au pays kitsch et ringard de l’âge d’or d’Hollywood. Le film se laisse d’ailleurs regarder, au contraire de beaucoup trop de films récents ou la réalisation offensante et le scénario indigent font obstacle à l’esprit conscient…

Et, compte tenu des films tournés autour de cette même histoire, ce n’est vraiment pas si mal.

In_Flaming_Technicolor

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