Don't rain on my parade...

Je le dis comme je le pense, je n’irai pas à la Gay Pride.

Ma préférence va à l'émission de ce billet, en souvenir des émeutes de Stonewall, l’étincelle qui alluma la flamme du mouvement gay tôt le matin du 28 juin 1969… Je n’ai rien contre l’idée de fierté gay, j’en reconnais même la nécessité dans une société qui, sans cela, n’aurait que la honte d’être homo… Je n’ai pas honte d’être gay, au contraire, j’en suis fier… Mais seulement aussi fier que peut être un hétérosexuel de son hétérosexualité !

Donc, pas vraiment... Je ne le cache pas, c'est tout.

A priori, pour moi, pas de quoi manifester. En plus, marcher avec des tas d’imbéciles sous des drapeaux de mauvais goût en écoutant de la techno encadré par des militants de gauche, très peu pour moi ! Non, vraiment, il y a trop de choses avec lesquelles je ne suis pas d’accord, tant dans le milieu gay que dans les convictions de ceux qui semblent faire l’âme de cette marche, pour que je rompe mon vœu d’individualisme.

La Une de TETU, le Cosmopolitan décérébré des gays et lesbiennes, s’interroge (au milieu d’une série de titres cristallins par l’absence de toute pensée encadrant un cover-boy délicieusement atone, comme d’habitude) sur l’utilité de la Gay Pride. Comme l’an dernier, ils doutent, parce que les droits des homosexuels ont progressé. Je n’ai pas lu ce qu’il faut bien appeler l’article, mais c’est aisé à deviner.

Mais évidemment, qu’elle est utile, bande de couillons ! Elle est même indispensable.

Ce n’est pas parce que je n’y vais pas qu’il ne faut pas la faire. Déjà, ça donne quelque chose à faire aux couillons… Ensuite, ça prouve au monde que les gays n’ont pas tous bon goût, qu’ils ne sont pas tous des folles discrètes et cultivées, qu’ils ne sont pas tous riches, qu’ils ne sont pas tous beaux… Bref, ça casse les stéréotypes, même si ça en entretient d’autres (comme « tous les gays sont de gauche et aiment la techno »).

Plus encore, ça permet aux gays d’être visibles. Rien n’est jamais acquis, et surtout pas les droits, pas même en France. Tant qu’il y aura de l’homophobie, tant qu’il y aura de pauvres gosses fichus dehors par leurs parents, tant qu’il y aura des discriminations vis-à-vis du mariage, de l’adoption, ou tout simplement pour acheter un appartement (et il y en a encore beaucoup trop)… Oui, la Gay Pride est nécessaire.

Et même si la société n’est pas prête à changer, l’ambition du mouvement gay est de forcer le changement… Sans quoi elle ne le sera jamais, prête. Et force est de constater que cette ambition a été couronnée de succès, vu qu’on est passé en à peine trente ans de l’homosexualité considérée comme un crime et une maladie mentale, à l’acceptation du mariage gay dans quelques pays.

Même si tous les homosexuels ne se reconnaissent pas dans ce mouvement (et tant mieux), toutes les dernières générations d’homos, tous ceux qui peuvent aller au lycée avec un Rainbow Flag, tous ceux qui vivent avec ne serait-ce qu’un peu moins de préjugés, avec le sentiment qu’ils ne sont pas anormaux, avec au mois un espoir de rejoindre des gens qui pensent comme eux, tous ceux-là doivent au mouvement gay… Leur vie, en fait.

Rien que pour ça, cela méritait un hommage.

Même si la Gay Pride, dans son incarnation actuelle, n’est qu’un ramassis de technoïdes gauchisants populaciers et pornos (je caricature à peine) qui viennent là pour bouger, boire et coucher à la fin ; même si cette marche a vraiment besoin de changer pour mieux représenter les homos dans leur diversité ; il y a une belle idée derrière… Et sans cette idée, sans cette marche, il n’y a plus de droits des gays.

Songez que beaucoup de pays prohibent ces marches, ou qu’elles se déroulent symboliquement en faisant juste le tour d’un parc encadré de policiers, avec autour des curieux qui jettent des cacahuètes ou des tomates… Songez à la situation en Russie, aux Etats-Unis, ou à celle en Israël, ou des manifestants orthodoxes haïssent tant les gays qu’ils n’hésitent pas à agir violemment…

C’est comme le droit de vote. Rien que parce que d’autres se battent pour l’avoir, n’en soyons pas blasés.