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Côté Beurre
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25 septembre 2006

Oh, when the saints...

Vous auriez pu être nombreux à me demander des informations supplémentaires sur les saints. Vous avez respecté mon intimité en ne le faisant pas, c'est bien. Je vais donc satisfaire aux muettes injonctions de la majorité silencieuse et faire mon intéressant. Alors voilà. Chaque corporation a son saint. Par corporation, je n’entends pas Microsoft ou Danone, mais bien un métier.

Comme les médecins, les avocats, les publicitaires, que sais-je encore… Vous le saviez bien sûr, tous ces noms sur le calendrier ne sont pas là que pour faire joli. A une époque, d’ailleurs, non seulement les corps de métiers vénéraient vraiment les saints et leur faisaient des processions à tours de bras (ou de villes), mais les saints servaient un but tout à fait quotidien.

Chaque paysan connaissait ses saints et ses proverbes, car ils lui règlent la vie agraire. Vous savez, l’été de la saint Martin, et les dictons comme « Temps de saint Gildas, temps de glace », « Il faut qu’à la sainte Eugénie toute semaille soit finie »… Eh bien si personne ne s’en souvient aujourd’hui (la faute à Météo France qui est quand même plus efficace) ça a servi pendant des siècles.

Au Moyen-âge, le péquenaud moyen pouvait sans hésiter vous donner les saints du jour (il y en a souvennt plusieurs, aujourd'hui plus encore), mais eut été bien en peine de vous donner le numéro et le mois sans demander à son curé ou à quelque citadin : c’est une manie urbaine de n’avoir que faire des saints agricoles et de compter les jours avec des nombres, comme un marchand…

Même aujourd'hui, qui que vous soyez, vous avez un patron. Eh oui, même en freelance ! Moi par exemple, je tombe dans la catégorie journaliste et écrivain (même si je ne suis pas publié…), mon saint patron est donc Saint François de Sales. Ce pourrait aussi être ce cher Saint Thomas d’Aquin, patron des universitaires, des étudiants, et accessoirement des libraires et papetiers.

Ou encore Saint Jean Bosco, protecteur des éditeurs, étudiants, jeunes et éducateurs, ou Saint Hilaire, protecteur des bibliothécaires fêté le 29 février… A moins que l’on ne préfère Saint Laurent, ou Saint Jean, qui ont plus ou moins les mêmes attributions. Les saints des métiers de l'écrit sont vraiment une flopée. C'est un des domaines ou il y a le plus de confusion.

Tout le monde connaît notre Sainte Jeanne d’Arc nationale (patronne des télégraphistes et de la Radio, car elle entendait des voix, si, si…), Sainte Barbe, patronne des artilleurs, mineurs et autres professions à risques, Saint Christophe le protecteur des automobilistes et de tous les conducteurs de véhicules, Saint Hubert, le patron des chasseurs...

Saint Honoré, patron des boulangers (et pâtissiers, bien sûr, le gâteau porte son nom !), Saint Valentin, patron des amoureux (et des épileptiques, priez-le, vous qui avez un ordinateur), Saint Patrick qui protège l’Irlande et Saint Georges qui veille sur l’Angleterre au cas où se pointerait un dragon, Saint Joseph, bien entendu patron des charpentiers et des cocus...

Sainte Geneviève, patronne de Paris ainsi que des gendarmes alors que c’est Saint Sébastien qui protège la Police en même temps que les archers… Cette confusion n’est pas unique. Saint Isidore, patron de la ville de Madrid et protecteur des agriculteurs, des charretiers et des ouvriers journaliers est souvent confondu avec le nouveau saint appointé par le Vatican à la protection d’Internet

Ce dernier, Saint Isidore de Séville, est loin du bon plouc qu’était l’autre Isidore. il a quand même été moine, évêque, et a rédigé une somme du savoir de son temps, bien avant l’Encyclopédie puisqu’il est mort en 636. En tous les cas les saints sont là, en chacun peut les invoquer, même si, comme le veut l’autre proverbe, il vaut mieux s’adresser au Bon Dieu directement.

Vous voulez écrire un poème enflammé et votre muse vous déserte ? Priez Saint Grégoire de Nazianze. Vous avez du mal en solfège ? Brûlez un cierge à Sainte Cécile, comme l’ont fait en chanson le groupe Mes Souliers Sont Rouges… Vous avez perdu un objet quelconque ou vous cherchez un mari ? Une petite prière à Saint Antoine de Padoue et c’est dans la poche.

Si vous vous êtes cassé la jambe, priez Saint Maur, c’est le protecteur des boiteux (et des chaudronniers, mais bon…). Vous êtes un touriste ? Adressez-vous à Saint Julien, patron des voyageurs, ou Saint François-Xavier, patron des touristes, marins et missionnaires. Vous déménagez ? Une prière à saint Aquilin, patron des porteurs.

Vous êtes un chien ? Aboyez en pensant à Saint Antoine, patron des animaux domestiques. Attention, si vous êtes une vache, un porc, une chèvre, une poule ou tout autre animal d'élevage, priez Sainte Brigitte, qui s’occupe de la basse-cour avec la laiterie et la forge. Et parfois les poètes. Oui, celle là est multi-tâches aussi.

Les Saints Cyrille et Méthode sont les patrons de l’Europe de l’Est, fêtés en même temps, et Saint Benoît est celui de l’Europe en général depuis 1964. On murmure (assez fort depuis que l’homosexualité n’est plus un crime) que Saint Sébastien est le patron que s’arrogent les gays : il ne fait pas que les agents de Police, il fait aussi les athlètes et les tapissiers.

Et puis cette façon qu’il a de se faire représenter dés la Renaissance comme un jeune éphèbe pénétré de toutes parts (par des flèches, hein... C'est un martyr, faut pas déconner...), alors que c’était techniquement un quadra dépassé quand on l’a martyrisé… Du porno clérical de l'époque, je ne vous dis que ça.

Et pour les saints comme pour les autres, il n'y a pas de sot métier. Les professions les plus modernes et les plus incongrues ont leur saint. Les Rois ont Saint Edouard III le Confesseur (ancien Roi d’Angleterre d’avant que Henri VIII ne pète les plombs), les fabricants de boutons prient Saint Aaron (le frère de Moïse, parfaitement !).

Les laryngologistes ont Saint Blaise (il sauva un enfant de l’arête de poisson qui allait l’étouffer… Il n’en fallait pas beaucoup à une époque, pour faire un saint…), Les calomniés ont Saint Jean Népomucène, les vidangeurs ont Saint Jules 1er, les éleveurs de vers à soie peuvent même s’adresser au pauvre Job, qui n’est pas vraiment un saint mais ça n’est pas si grave.

Il y a eu une Sainte déportée, morte à Auschwitz, Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix, aujourd’hui une autre patronne de l’Europe. Même Saintes à une sainte. Mais si, Saintes, en Charente-maritime. Eh bien la protectrice de Saintes, c’est Sainte Estelle. Oui, c'est très logique. Du reste, la plupart des villes et villages s’attribuent un saint ou plusieurs, juste au cas où…

Quant à ceux que j’ai cité au début, les avocats, magistrats et notaires peuvent s’adresser à Saint Yves (ainsi que les pauvres et les déshérités, que beaucoup d’avocats méditent là-dessus…) ou Saint Thomas More. Les agents de publicité peuvent prier Saint Bernardin de Sienne (et, étrangement, avec les boxeurs et les prédicateurs, puisque leur profession tient un peu des deux…).

Les gens de télévision prient Sainte Claire sans décodeur, les chirurgiens prient Saint Roch, les médecins Saint Pantaléon, Saint Côme et Saint Damien (qui eurent les premiers l’idée de la greffe d'une jambe de mort sur un vivant, laquelle ne fonctionna absolument pas, mais c’est l’intention qui compte…), ou carrément Saint Luc l’évangéliste.

Attention, si vous êtes seulement malade, vous avez vos saints dédiés, n’allez pas inconsidérément embêter les saints des médecins ! Des saints, il y en a une tripotée, plus même que dans un seul calendrier… Vous vérifierez vous-même à qui vous devez vous adresser, à quel porte frapper, à quel bureau toquer et quel formulaire remplir, vous devriez être habitué si vous vivez en France.

Saint_S_bastien__de_Nicolas_Regnier

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