Spécial rentrée des classes

Je dédie ce billet à tous ceux qui se sont fait tabasser à l’école, emmerder par des petites frappes, racketter à la sortie des lycées ou mépriser par l’inévitable sportif beau, populaire et large mais con. Je connais, j’ai subi, comme une majorité de gens à un moment ou à un autre. Que ceux qui endurent un tel traitement ces jours-ci reprennent confiance et courage, notre siècle a maintenant produit pire. D’abord, c’est pas la mort. Si ça le devient, il faut vite prévenir quelqu’un. Il y a des autorités compétentes, directeurs des lycées, ou même la police si ça devient grave (s’il y a des armes, de la drogue ou du viol dans l’air…). Je vous jure, c’est important : ce genre de choses, ça ne se résout pas seul : il y a une différence entre cafter par intérêt et demander la protection de ceux qui sont là pour ça. Personne ne devrait avoir à les subir, mais ils sont là ; les petits cons de ce type sont des gens qui se détestent, au fond. C’est prouvé, les pires homophobes sont des homosexuels refoulés. A l’intérieur de leur pauvre petite tête, les jeunes racketteurs sont rarement des gens qui font ça parce qu’ils y ont réfléchi : ce sont des gamins en pleurs ou en but à des problèmes. C'est tellement commun !

Après, qu’ils aient été violés par leurs frères, molestés par leurs tantes, battus par leurs oncles, que ce soit leurs parents qui divorcent méchamment, ou que leur tuteur alcoolique leur dise qu’ils sont des moins que rien, les explications varient. Et on ne peut que les plaindre. Ils ont besoin d'aide... Alors aidons-les à ne plus s'en prendre aux autres. C’est peut-être une excuse, pas un passe-droit. Toujours est-il que leur existence manque d’épanouissement. Populaires au lycée, l’apogée de leur minable petite vie se fait vers 16 ou 17 ans. C’est là qu’ils s’amusent le plus à taper les petits binoclards. On serait presque tenté de les laisser faire, par pitié : Le binoclard survivra et sortira de la fac avec un diplôme que ceux qui l’emmerdaient ne pourraient même pas prononcer. Et avec un boulot.

Pendant que l’autre crétin se fera virer de son premier job de serveur, le binoclard fêtera son premier million de dollars. Qu’est-ce que vous voulez, c’est la vie ! La violence, ça n’est jamais normal, ni la coercition. Avec le progrès, un nouveau genre de crime se met en place dans les écoles. Les téléphones portables avec caméra fournissent des moyens de pression que vous n’imagineriez pas.

De nos jours, dans les lycées, chaque élève possède en substance un caméscope de qualité moyenne. Les sons, images et vidéos sont envoyées instantanément sur tous les téléphones des autres élèves, et ça traverse les murs des classes. Et chaque soir, tout passe par Internet, MSN ou autre. En une journée, la vidéo avec le son qui ridiculise tel prof et tel élève a fait tous les lycées de France.

Ce ne sont plus des rumeurs, mais des preuves qui circulent… On a vu des vidéos de filles se faisant violer par une bande de lycéens qui tournait du porno amateur avec ces téléphones et faisait voir ensuite. On a vu aussi des élèves se faisant tabasser, dans la même veine. Mais même les plus bénins enregistrements sont souvent des atteintes à la vie privée, ce qui est déjà assez grave.

Est-ce la revanche du gosse de riche pour les brimades qu’il a subi ces derniers siècles dans les lycées publics, maintenant qu’il peut se payer des outils de chantage perfectionnés ? Est-ce une nouvelle manière d'emmerder les plus faibles ? Le progrès a-t-il simplement rendu le fléau des cours de récrés plus inventif ? Une chose est sûre, c’est toujours le même jeu de pouvoir mesquin et impitoyable.

Pour pallier à ce qui ets perçu comme un manquement du système éducatif, mais que je perçois surtout comme un symptome d'une mutation culturelle plus profonde de la société toute entière, le gouvernement revient aux bonnes vieilles méthodes : la note de conduite. Oh, ils appellent ça "comportement citoyen", et certains veulent même redonner des cours de morale, mais nil novi sub sole.

Je ne saurais dire si c'est bel et bon, mais il faudrait déjà leur apprendre le français avant de songer au reste, à ces enfants-là.